Marielle Stamm
Un mercredi violet!

14.06.23

Aujourd'hui

Par Anne-Sylvie Weinmann, avocate et data scientist.


© Musée Bolo - Magazines de Marielle Stamm

L’informatique en couleurs! Revues, magazines, journaux, des milliers d’articles, mais une unique passion comme moteur: « J’ai aimé vulgariser l’informatique! », au-delà des machines, l’humain | © Musée Bolo

Une femme, journaliste en informatique. Une pionnière!

« Ce que la Suisse d’aujourd’hui doit aux pionnières venues d’ailleurs » titre la une du journal Le Temps de ce mercredi violet, journée de la grève des femmes.

Marielle Stamm sur le stand de 01 Informatique lors de Computer 78. Pas loin de six mille visiteurs ont fait le déplacement jusqu’au Palais de Beaulieu à Lausanne pour cette première grande exposition informatique romande réunissant une cinquantaine d’exposants.

Au centre: Marielle Stamm sur le stand de 01 Informatique lors de Computer 78. Pas loin de six mille visiteurs ont fait le déplacement jusqu’au Palais de Beaulieu à Lausanne pour cette première grande exposition informatique romande réunissant une cinquantaine d’exposants| © Marielle Stamm | Archives du Musée Bolo

Début 2022, j’ai eu la chance de rencontrer une pionnière presque « venue d’ailleurs ». Marielle Stamm, pionnière du journalisme en informatique naît à Marseille, avant la seconde guerre mondiale, grandit dans la cité phocéenne où son grand-père arrivé du canton de Schaffhouse s’était installé en 1888.

Poughkeepsie, Marseille, Tokyo, Paris, Marielle Stamm suit, dès le milieu des années 50′ du siècle dernier, son premier mari qui « avait décroché un job chez IBM; c’étaient les balbutiements de l’informatique ».

Elle songe à divorcer, compliqué dans les années soixante! « Je ne cherchais pas à toucher une pension alimentaire, je voulais travailler, trouver un job ». Un parcours du combattant. Un refrain tourne en boucle dans la bouche de ses interlocuteurs: secrétaire, secrétaire, secrétaire. « L’équation était simplissime. J’étais une femme donc je ne pouvais qu’être secrétaire ou hôtesse d’accueil. Au Ritz, par exemple pour répondre au téléphone à côté du concierge. On m’a proposé cet emploi alors que mes anciens camarades de Sciences-Po de l’autre sexe obtenaient des emplois de directeurs ».

Au bout d’un chemin rocailleux, jalonné toutefois d’heureuses rencontres, les portes de la SESA, Société d’Études des Systèmes automatisés, s’ouvrent à elle en 1969. Engagée avec le titre vague d’attachée de direction, et sans aucune mission, elle crée du marketing avant l’heure: les magnifiques Cahier SESA, une exposition pionnière: « Ordinateur et Création Artistique » (1973) à laquelle était présente une autre pionnière, Vera Molnar (1924-2023), « une grande artiste », qui troqua ses pinceaux contre un véritable IBM 370, apprend-on dans une vidéo que lui a consacrée le Centre Pompidou. Elle souhaitait « créer des œuvres qui ne soient pas issues de l’inconscient mais résulter d’un choix calculé. Un hasard provoqué et maîtrisé ».

En 1974, Marielle Stamm s’installe en Suisse par amour pour son second mari. « Quand je suis arrivée en Suisse le mot ordinateur et le mot informatique étaient absents de la presse quotidienne, une terminologie encore inconnue. La presse de niche présentant l’informatique n’existait pas encore en Suisse. Quand on me demandait quel était mon métier et que je répondais que j’étais journaliste en informatique, on me regardait avec des yeux « gros comme ça », (et de joindre le geste à la parole). C’est quoi un ordinateur? Seuls les spécialistes connaissaient ce mot et sa signification. J’étais une pionnière! » explique celle qui se rêvait pianiste, un autre clavier!

C’est elle qui amènera l’informatique dans nos kiosques et boîtes aux lettres romandes.

En 25 ans, elle a façonné son premier job et inventé son métier, est devenue journaliste en informatique. Elle a publié 225 journaux ou magazines, écrit plus de quatre mille articles, vulgarisé l’informatique à l’intention d’un nouveau public de Suisse romande, créé une PME, formé des journalistes, dirigé une équipe et sauvé des emplois.

En s’affranchissant, à force de persévérance et de travail, des carcans que lui imposait son époque, Marielle Stamm a ouvert des voies longtemps interdites aux femmes. Merci, infiniment!

Je vous invite à (re)découvrir sur la page Mémoires vives du Musée Bolo, le portrait de Marielle Stamm: Des mots pour le dire – Partie 1 et Partie 2.

Marielle Stamm fait partie du magnifique projet de préservation et de partage 𝗝’❤️ 𝗺𝗼𝗻 𝗦𝗠𝗔𝗞𝗬 que le Musée Bolo a initié en 2023. Son objectif est de rendre le patrimoine informatique, vidéo ludique et journalistique suisse romand visible accessible au public via le site web dédié smaky.ch, une future exposition et des événements. Les détails du projet complet et détaillé sont disponibles ici.

Pour une visite, libre ou guidée, du Musée Bolo, cliquez ici!